TC 4 ► STORMY HOURS ARE COMING

stormy hours are coming.

Si le temps est à la fraîcheur, Fairview n'est pourtant pas à l'abri d'aléas climatiques autres que la neige. Et en effet, alors que la nuit approche, le ciel s'assombrit dangereusement, présageant d'une tempête annoncée depuis quelques jours. Ciel orageux, températures fraîches mais atmosphère suffocante, et bientôt, les gouttes de pluie, puis un torrent qui s'abat sur Fairview, rendu discernable par les éclairs. Le bruit assourdissant du tonnerre retentit sur la ville, et très vite, il devient indispensable de mettre tout le monde à l'abri. Comment ? En réunissant tous les habitants dans un endroit sûr, où tous n'auront pas à craindre la tempête. C'est ainsi que l'ordre est donné par la Maire (conjointement avec le Shérif, chargée de la sécurité), de réunir tout Fairview dans les sous-sols de la boutique tenue par Carter. En effet, là on y trouve des dédales labyrinthiques, mais à l'abri de tout danger... du moins semblait-il. Car entre les objets étranges qui sont entreposés, la noirceur du sous-sol et son ambiance très peu rassurante, les crises d'angoisse menacent les habitants. Lorsqu'en plus, on les assigne par petits groupes pour éviter des bousculades, les esprits s'emballent au rythme du coeur, et les tensions s'exacerbent. Certains semblent avoir des comptes à régler, et quel meilleur moment pour le faire que lors d'une tempête, alors que tout le monde est pris au piège ? Pas sûr que l'orage soit plus dangereux que les sous-sols...

♦ GROUPE 3 (supervisera les groupes)

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Une main inconnue l'invita à s'enjoindre au reste des troupes et à pénétrer dans l'obscurité morbide des sous-sols de Fairview. Le cœur palpitant d'une petite frayeur qu'elle jugea idiote, Elise s’engouffra dans cette pénombre ambiante et insalubre, sans avoir la certitude que les quelques lumières qui éclairaient ces catacombes l'aideraient à rejoindre son groupe. Membre du comité de la ville, elle était l'une des premières à avoir pris connaissance des formalités anti-tempête et des mesures, qu'elle jugeait un peu trop drastique. La seule donnée manquante à cette escapade improvisée dans les sous-terrains de la « Cave of Wonders » restait la composition de son groupe. Elle s'avança d'un pas prudent dans ce dédale inhospitalier, l'hypothèse qu'un monstre pouvait être dissimulé au détour d'un couloir l'effrayant assez pour qu'elle ne jette un coup d’œil attentif à toutes les intersections. Elle se détesta d'avoir accepté de se plier au jeu de l'abri antiatomique. Ce n'était qu'une affreuse tempête après tout et Elise était de ceux qui adorent la pluie. Elle s'imaginait être chez elle, bien au chaud dans ses draps à siroter un bon thé et attendre que cela ne passe. Mais non, en bonne citoyenne, elle se retrouvait à déambuler dans un labyrinthe couvert de saleté et dont la fragrance dégageait une odeur nauséabonde. « .Il y a quelqu'un ?. » se hasarda-t-elle à lancer d'une petite voix, intriguée par l'absence de mouvement, même de bruit. D'ordinaire toujours en quête d'un silence reposant, elle remarquait qu'aucun bruit parasite ne venait troubler l'écho stressant des luminaires endommagés au plafond. Un bourdonnement intense, que finalement quelques bruits de pas vinrent trahir. Retenant sa respiration, c'est lorsqu'elle ferma les yeux d'appréhension qu'une entité l'abordèrent dans un bien étrange dialecte. « .Wesh Lisou, bien ou bien ? Tiens, ton groupe. » Suis-je morte ? Assaillie par un homme de l'espace ? Dans sa dernière prière, elle s'intima de tout son cœur que selon elle, les fées existent. Le bruit du papier presque froissé l'incita à ouvrir ses paupières, redescendre sur terre et a arrêter ses idioties. Poussant un soupir de soulagement, elle remarqua qu'il s'agissait de l'un des habitants de Fairview. Une armoire à glace, deux fois plus grand qu'elle, vingt-fois son poids en sucreries et sale jusqu'au bout des ongles. Plait-il ? Wesh ? Il essaye de communiquer, songea-t-elle. Lisou qu'il l'appelait, qui plus est. Elle n'aimait pas les surnoms, encore moins lorsqu'ils étaient aussi idiot de Lisou. Et la simple vision de ses mains pleines de cambouis donnèrent l'envie à Elise de prier pour que la pluie extérieur ne se transforme en débandade de lingettes antiseptiques. Elle attrapa la fiche qu'il lui tendait, sans détacher son regard de cette montagne d'immondices vivante. « .Merci. » concéda-t-elle, toute polie, sans que son regard ne soit totalement dénué de ce dégoût remarquable qu'elle éprouvait à son égard. Toujours très propre, très soignée et très maniérée, Elise peinait à comprendre les personnes qui parlaient de façon aussi brute et sans élégance aucune, mais qui surtout ne prenait pas la peine de prendre soins d'elles. La tempête extérieur et la saleté ambiante ne justifiait en rien ce genre d'attitude. Le gratifiant d'un sourire forcé, elle le congédia d'un regard et poussa un profond soupir. Esseulée et effrayée par les environs, ainsi que les tremblements offerts par la tempête extérieur, elle espéra mettre rapidement la main sur quelque de son groupe. Adossée contre le mur, elle pressa la feuille de papier contre elle. « .Je veux que la prochaine personne qui apparaisse soit ... » annonça-t-elle à haute voix, serrant la feuille dans ses doigts avant de finalement relâcher son étreinte et oser un regard sur la liste de noms. Une lecture attentive lui apporta la joie non contenue d'avoir Grace, Wren et Jaden à ses côtés, la curiosité d'avoir Callie et Nate, qu'elle ne connaissait pas du tout et l'appréhension d'avoir Bonnie et James, qu'elle connaissait très bien pour l'une... Quant à l'autre, depuis qu'elle se souvenait avoir rêvé de son mariage avec lui, elle ne savait que penser de celui qu'elle considérait comme un étrange opportuniste. James Reavers. Elle ne savait que penser de lui et préféra éluder ses rêveries idiotes du nouvel an. Enfin, le dernier nom laissa ses pensées pantoises et son cœur alarmé. « …N'importe qui excepté Edward Livingston. » siffla-t-elle, désœuvrée de devoir organiser cette cachette de fortune avec lui et d'autres qu'elle connaissait moins. Son seul réconfort était qu'elle pourrait se cacher derrière Grace si jamais l'idée venait à Edward de venir l'enquiquiner. Parce que Grace, elle fait peur à tout le monde. Elle pensa un instant que celui qui avait créée les groupes faisaient exprès. L'idée était de la torturer, de les torturer tous. Au moins, ils étaient déjà tous six pieds sous terre et pourraient organiser des funérailles rapides et sans fioritures. « .Oh non... » murmura-t-elle, désemparée. Elle sentait par avance que cela n'allait pas bien se passer. Normal. Au menu : La maire sans cœur, l'emmerdeur apocalyptique, la drama queen en puissance, le bibliothécaire bourru, la princesse fragile et maniérée, le prince pas trop charmant, son cousin coureur de jupon, la jumelle sympathique et le solitaire reclus.

La pluie battante ne perturbait nullement le bibliothécaire confiné au fond de son bureau depuis deux jours entiers déjà. Wren n'avait pas quitté cette petite pièce, complètement absorbé par la montagne de livres siégeant sur la commode en face de lui. Loin de s'imaginer qu'une tempête approchait à grands pas de la ville, il ignora d'abord les recommandation de sa bibliothécaire pour finir par céder sous la pression. Nova avait beau être une personne fort agréable et adorable, la nervosité qui l'animait cette nuit là la rendait presque folle à liée. Loin d'être en proie au stress et très peu enclin à quitter son refuge pour se mêler à la foule de Fairview dans des caves qui plus est, c'est en grognant – comme à son habitude lorsqu'il s'agissait de quitter ses vieux bouquins poussiéreux et sa bibliothèque – que Wren se dirigea vers le magasin de Merlin. Ou Carter. Qu'importe son nom, il se fichait, de toute façon, éperdument de cette petite mise en quarantaine. C'est vêtu d'un costume trois pièces sombre que le bibliothécaire pénétra dans les sous terrains du magasin, non sans une grimace de dégoût. Ses doigts flirtèrent avec les mûrs de pierre et, d'un geste rapide et précis, il les essuya rapidement de cette monstrueuse poussière visqueuse noire. Les autorités de Fairview avaient-elles réellement décidé de les laisser croupir au fond de ces égouts (non, décidément, cet endroit ne pouvait pas être considéré comme étant des caves puisque la vue et l'odeur l'apparentaient plutôt à des égouts dégoûtants) ? Cette décision conforta le bibliothécaire dans son plan de récupération et sa motivation à haïr chacun des habitants. A cet instant précis, la shérif Rose se retrouva en tête de liste. Ainsi que la blondinette prise d'une crise de panique lui hurlant le nom de son groupe d'une voix fluette à laquelle il voulu mettre fin dans un étranglement violent. Ses oreilles continuèrent à siffler un long moment avant que le fantôme de cette voix ignoble – et encore, le mot était plutôt faible – ne sorte de son crâne. Ses yeux sombres et inexpressifs parcoururent la dite feuille lui expliquant soigneusement sa tâche, et son groupe. Alors, il avait été consigné de force dans cet endroit insalubre et devait, en plus, exercé une tâche pour laquelle il n'avait pas été formé. Les lèvres du bibliothécaire s'ourlèrent en un sourire méprisant. Si Wren avait toujours ressentit une haine incommensurable pour cette ville et ceux y vivant avec la joie et la naïveté qui leur avait été attribuée, cette aventure le confortait dans l'idée que son royaume n'était plus désormais qu'un champ de ruine. Ses sujets n'avaient même plus de quoi le divertir tant les fées les avaient rendus affreusement communs et.. humains. Calmement, veillant à ne rien toucher et surtout pas un seul de cette montagne d'objets poussiéreux, Wren se dirigea à l'endroit même où il avait été assigné. L'idée de ressortir sans être vu lui avait bien évidemment traversé l'esprit mais il était clair que les autorités ne laisseraient passer personne. Ces humains pouvaient être niais et inintéressants à souhait, ils étaient également incroyablement têtus et butés. De quoi ravir l'ancien roi, réellement. Une moue résignées sur le visage, il s'avança à l'encontre de la seule personne déjà présente sur les lieux, et pas des moindres. Elise Steadworth qui fit instantanément revivre son palpitant constamment éteint. Hormis Grace – que Wren espérait voir depuis que ses yeux avaient longuement flirté avec son nom présent sur sa fiche – La jeune Steadworth était bien la seule à parvenir à cet exploit : faire battre son cœur plus que de raison et effacer cette grimace de son visage. « Quelque chose ne va pas ? » s’enquit-il d'une voix de velours, ses doigts frôlant les siens d'une douceur qu'il fit passer pour de la maladresse, plutôt habile dans le genre. Cette tempête amenait peut-être quelque chose de bon, finalement. S'imaginant – bien qu'Elise ne cessait de lui rabâcher le contraire – l'enquiquiner à chaque fois qu'il se présentait à elle, son caractère de cochon et son air constamment blasé n'étant pas les caractéristiques plus faciles à vivre, la retrouver sans qu'il n'y soit pour rien dans ce lieu – certes horrible, mais la présence de la jeune femme avait le don de tout effacer – avait quelque chose de féerique. « Prends ma veste. » lui intima-t-il, constatant les frissons parcourant l'avant de ses bras ainsi que la base de son cou. Oui, face à Elise, Wren n'omettait aucun détail et ses yeux s'insurgeaient du moindre frisson, du moindre battement de cil. Le tout ayant un impact involontaire sur sa propre personne. Dans des moments comme celui-ci, l'ancien roi détestait ses souvenirs. La moindre petite image concernant leur histoire passée défilant joyeusement dans sa mémoire.

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Cette histoire, elle n’avait fait que passer. Il ne s’y était pas intéressé et ne l’avait pas prise au sérieux. Le temps pouvait se déchainer s’il voulait, cela ne changerait rien à son existence plate et pénible. Que le vent souffle jusqu’à déraciner les arbres ou que la pluie s’abatte à les inonder, c’était futile d’y songer. Personne ne pouvait contrecarrer ce genre de catastrophe naturelle, personne ne pouvait braver une tempête et la stopper d’un simple geste. Alors, l’information, elle avait coulée. Comme un fait divers dans le journal, comme une blague mal racontée. Il y avait un peu pensé au début et puis, il l’avait oublié. Il s’était répété que, si cela arrivait, il finirait bien par le savoir de toute façon. Et, en effet, il l’avait su. Et pas de la meilleure des façons. Le temps s’était mis à gronder avec férocité alors que son restaurant était plein à craquer et que les gens étaient tranquillement en train de s’abreuver de ses mets délicieux. Résultats des courses ? Des tas de gens en uniforme avait fait évacuer le bâtiment sans même penser aux notes qu’il n’aurait pas le temps distribuer. Il avait bien essayé de s’insurger, de leur gueuler qu’il ne bougerait pas de là et que le premier qui le toucherait finirait au tapis mais tous ses arguments n’avaient pas eu le moindre poids. On l’avait menacé de lui mettre les menottes s’il ne teignait pas faire ce qu’on lui disait. Jaden, il n’avait pas envie d’ajouter à sa réputation déjà bien noircie cette image peu valorisante. Il avait fait ce qu’on lui avait dit. Ruminant intérieurement contre le monde entier de lui faire ça, contre le ciel pour continuer de massacrer sa vie. Il avait marché jusqu’à la boutique la plus bizarre dans la ville avec l’espoir de pouvoir se dérober entre temps. Rejoindre son habitation, c’était la seule chose qui le rassurait un peu. Mais il avait été si bien entouré que, quoi qu’il ait tenté, il se retrouvait mêlé à une foule de gens. Pour la première fois depuis longtemps, Jaden était en phase avec le reste du monde. Il n’était pas plus reclus que n’importe qui, pas plus en marge que le dernier des marginaux. Il faisait comme tout le monde, même si ça lui en coûtait beaucoup. Vaguement mouillé, il avait slalomé dans les labyrinthiques sous-sols du magasin dans l’espoir de trouver un endroit où se terrer. Mais on lui avait tendu une fiche et il avait grondé en lisant les noms sur le papier. Il ne connaissait pas grand monde au final. Le nom de Levingston lui parla parce qu’il se rappelait l’avoir lu dans le journal. Celui de Grace aussi, pas suffisamment reclus pour ignorer qui était le meilleur de la ville. Contre à Elise et Wren, il n’était pas certain d’avoir envie de les croiser. La première le mettait incroyablement mal à l’aise. Dans ses prunelles, il y avait un écho de douloureux souvenirs qu’il aurait préféré fuir. Son cœur s’agitait comme un drôle de poisson malade, hors de l’eau, quand elle était dans les parages et ça le gênait. Le second représentait tout ce qu’il détestait et tout ce qu’il n’oublierait jamais… Il préféra serrer les poings et ne pas y songer en traversant les lieux. Pourtant, à peine avait-il infiltré l’endroit que déjà il rêvait de se dérober. Il se retrouvait coincé entre ces personnes qu’il ne voulait pas voir et… Tout se mélangeait. Cette jalousie maladive qu’il avait ressentie autrefois se réveillait en voyant Wren si proche d’Elise. Cette jalousie qui l’avait autrefois bouffé et dévoré et qui, aujourd’hui encore, lui donnait envie d’envoyer son poing dans le visage de Kennedy. Jaden, il préféra se mettre à l’écart, dans un coin. La mine sombre, les sourcils froncés et le regard glacé, il souffla plus pour lui que pour le reste du monde : « faites comme si j’étais pas là. » parce que, pour ne rien changer à ses habitudes, il resterait toujours ce solitaire reclus que le monde ne voulait pas faire entrer dans sa ronde.

Grace ne craignait pas la tempête qui menaçait de s'abattre avec violence sur Fairview, condamnant les habitants à l'inaction la plus totale pour une durée difficile à prévoir, mais qui pouvait excéder plusieurs jours. Au contraire, la maire accueillait ce déferlement de la nature avec une rare bienveillance, estimant qu'il lui permettait d'éblouir les moutons qu'elle gouvernait de son sang froid et de sa gestion de crise sans accrocs. En effet, la boutique de Carter s'était imposée à elle naturellement, puisque c'était le seul lieu souterrain de la ville assez vaste pour accueillir la population. Et il était de bon ton, lors de tempêtes, de rejoindre un abri solide, où la chute d'un arbre ne risquerait pas de démolir un toit et de scalper un habitant - bien que cette perspective ne l'aurait pas réellement émue, soit dit en passant. Consciencieusement et avec l'aide des autorités compétentes, Grace avait échafaudé un plan d'évacuation, commandé des réserves importantes de conserves et autres couvertures et préparé ce qui s'apparentait à un siège. Bien sûr, elle s'était montrée trop prévoyante. Les habitants pourraient sans nul doute survivre deux nuits sans tout ce confort, mais elle tenait à faire les choses correctement. Si Grace s'avérait être une personne antipathique au caractère intimidant, l'on ne pouvait pas lui reprocher de posséder les qualités requises pour son métier. Quand bien même devenir maire n'avait jamais siégé en tête de ses aspirations. Peu encline à travailler plus que de raison après avoir pensé au moindre détail de ce refuge, Grace avait commandité à son assistant (chargé de former les groupes) de l'assigner au groupe chargé de superviser. Un terme savant pour un rôle mineur : celui de ne rien faire du tout, tout en feignant d'observer comment se géraient les habitants ainsi que leur mécanique d'ensemble. Présente depuis quelques heures déjà au sein des sous-sol, Grace distribuait sourires chaleureux tout en serrant la main aux quelques énergumènes qui l'imaginaient (à raison) en représentation. Prête à aller rejoindre son groupe (sans en connaître la composition), ses talons retentissant dans un bruit sourd furent néanmoins stoppés par ce désagréable filet à son oreille : « Eh, petit. N’aies pas peur. On doit tous crever. Ici, c’est bien, on est tous ensemble ! » Avait-elle bien entendu ? Ni une, ni deux, Grace fit volte-face avant de darder ses prunelles électriques sur le visage détrempé du sdf officiel de la ville, Reid Reilly. Grace ne savait rien de lui, si ce n'est qu'il faisait réellement mauvais genre dans sa ville et qu'elle aurait bien apprécié s'en débarrasser comme on chasse un insecte nuisible. Encore plus maintenant qu'il ruinait le calme qu'elle tâchait d'instaurer ici. En effet, la maire (malgré son apparente sérénité et l'étrange bonne volonté qu'elle mettait à l'ouvrage) n'était pas prête à supporter les voix hystériques et aigus des cruches du coin et les cris insupportables de leurs sales mioches. Avait-elle mentionné son profond désamour pour les enfants ? Non ? Voilà qui est fait. Fondant sur Reid avec l'agilité d'un félin prêt à dévorer sa proie sans pour autant attirer son attention, Grace se saisit de son col trempé sans détour pour forcer le raté à la regarder droit dans les yeux... plus glaciaux que jamais et qui semblaient lancer le même genre d'éclairs qui crevaient le ciel de Fairview. « Vous vous croyez malin, Reid Reilly ? On vous a demandé de rassurer les gens alors si même cette simple tâche est largement au-dessus de vos capacités, taisez-vous, trouvez-vous un fichu banc dans ces souterrains et épargnez-nous vos inepties. » Sa réplique fusa, aussi tranchante que venimeuse et même le naturel suave de sa voix ne put aider à rendre le tout moins coupant. Satisfaite, Grace se désintéressa du sort de Reid après un dernier regard menaçant (après tout, ne devait-elle pas superviser ?) avant de rejoindre le coin qui lui était dévolu, retrouvant sa superbe et son traditionnel air indifférent... pourtant mis à mal par le spectacle qui se jouait devant elle. Elise et Wren, tous deux très proches. Étrangement, sans qu'elle ne comprenne pourquoi, la vision lui offrit un frisson de dégoût qui dévala son échine. Pourtant, Elise était sa seule amie sincère et le bibliothécaire... et bien ne lui déplaisait pas tant que ça. Mais il n'y avait rien à faire : si elle les appréciait séparément, les voir ensemble lui procurait une curieuse sensation, comme s'ils faisaient quelque chose d'interdit ou pire, de contre-nature. Pendant un instant fugace, Grace repensa à la vision provoquée par la fuite de gaz qui lui avait donné envie de faire souffrir Elise plus que jamais, avec l'intime conviction que par sa vie, elle lui dérobait quelque chose qui devait être sien. Qui était sien et lui échappait insidieusement. Lier ces deux scènes semblait complètement hors de propos mais pourtant, une once de l'amertume ressentie envers Elise la posséda (tout en sachant que c'était tout bonnement surréaliste), assez pour qu'elle ne la rejoigne pas et la laisse en bonne compagnie. En règle générale, Grace serait allée la voir. Tout d'abord pour la rassurer quant à la suite des évènements et surtout, pour se trouver en agréable compagnie. A la place, la maire ne leur adressa qu'un vague regard, un brin troublée, avant de s'emparer d'une liste pour y découvrir avec effroi que Maxence devait avoir une dent contre elle (ou ne pas avoir connaissance de certaines histoires) pour lui imposer telle compagnie. Edward, Nathaniel, les jumelles toujours promptes à se déchirer... La soirée s'annonçait épuisante. Seule la présence de James aurait pu lui plaire, dans un autre contexte, mais en public, ils n'étaient que deux quasi-inconnus et Reavers ne lui serait malheureusement d'aucun soutien. Enfin habituée à la pénombre, Grace distingua la présence de Jaden, reclus dans un coin de la pièce. Elle aurait pu le saluer (après tout, elle dînait régulièrement au sein de son restaurant), mais s'abstint. Son regard presque aussi glacé que le sien parlait pour lui, et la maire préférait éviter de rompre le calme de la pièce, qui ne manquerait pas de voler en éclats dès tous les protagonistes en place...

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Revêtant son plus bel air agacé, en drama queen absolue qui se respectait, Bonnie minauda auprès de l'agent venu au Love Philter pour l'embarquer au Cave of Wonders. La tempête sur Fairview ? Elle s'en moquait royalement, parfaitement bien où elle se trouvait, à boire un café en lisant une revue de mode. L'avantage de ce genre de temps houleux était l'absence de clients et donc la possibilité de rester au calme. Pas d'Edward psychopathe à proximité, pas de Callie-je-suis-meilleure-que-toi, seule la présence de Nate lui manquait, si elle n'obstinait pas si farouchement à jouer les petites amies vexée de son manque d'attention au Nouvel An. « Oh monsieur l'agent, je suis certaine que ma présence là-bas n'est absolument pas nécessaire » tenta-t-elle, mais son visage resta complètement impassible face à ses mimiques qui se voulaient enjôleuses. Contrainte d'admettre qu'elle n'arriverait à rien, elle opta alors pour la bouderie, et croisa ses bras contre sa poitrine, alors même qu'il l'entraînait avec elle en direction de la boutique. Pour ce qu'elle en savait, on parquait le tout Fairview comme du bétail dans cet endroit car il se trouvait relié à des tas de tunnels et autres endroits glauques susceptibles de les abriter si la tempête venait à s'éterniser. Elle espérait que cela ne soit pas le cas. Le monde de Bonnie Cartwright n'aurait pu souffrir d'une journée entière avec le vernis écaillé qu'elle n'avait pas eu le temps de refaire, une coupe de cheveux désastreuse qu'elle réservait aux moments où elle n'avait pas besoin d'éblouir le monde entier et des vêtements particulièrement peu appropriés à l'événement. Malgré les protestations du policier, elle avait refusé d'ôter ses talons de quinze centimètres, prétextant qu'elle était comme dans des chaussons alors que ses orteils lui imposaient une symphonie douloureuse tandis qu'elle marchait sur les rues pavées. Elle ne tiendrait pas toute une nuit avec, pour sûr, mais quitte à se terrer avec les autres habitants, elle pouvait au moins faire l'effort de se rendre belle. Sans doute que personne n'aurait fait de même, lui laissant le loisir de subjuguer l'assemblée (l'idée que ceux-ci puissent s'en moquer éperdument ne lui effleura même pas l'esprit, à vrai dire). L'ambiance semblait tendue, au Cave of Wonders, ce qui ne la surprit même pas. Personne n'était particulièrement ravi de se trouver ici, en compagnie du reste de la ville. Bonnie déambula avec son air impérial, juchée sur ses talons haut, dépassant d'une bonne tête une grande partie des personnes présentes, qu'elle toisait avec dédain. Elle entendit une voix familière retentir non loin d'elle et tourna la tête. Elise lisait une liste, et elle peinait à se faire entendre, avec le brouhaha qui envahissait l'endroit. Bonnie tendit l'oreille, suffisamment pour attraper quelques noms au passage. Le groupe auquel on l'assignait serait chargé de superviser les autres groupes. Merveilleux, songea-t-elle. Elle n'aurait même pas besoin de mettre la main à la pâte et prétendre vouloir aider les autres. Elle se contenterait d'être l'inspecteur des travaux finis, prête à hurler sur quiconque n'obéirait pas à ses ordres. Elle n'aurait pas pu mieux tombé. Ce constat s'ébranla pourtant bien vite lorsqu'Elise parvint à la fin de sa liste. Quiconque rédigeait ces listes devait avoir un humour particulier, pour la mettre avec ce crétin congénital de Livingston, apparemment déterminé à faire de sa vie un enfer depuis qu'elle l'avait envoyé sous les verrous pour une nuit. Elle poussa un soupir frustré, ses yeux suppliant de ne pas la laisser avec ce fou furieux qui trouverait sûrement un tas d'accessoires pour la torturer. Même la présence de Grace ne suffisait pas à la rassurer. Elle choisit néanmoins d'aller vers elle, espérant que sa présence austère décourage le journaliste d'entamer une macabre partie de cache-cache en sa compagnie. Elle offrit un sourire froid à la maire. « Bonsoir Grace. Quelle organisation ! Je ne savais pas que l'on préparait un siège ici... » constata-t-elle de son ton supérieur. « J'ai une requête à te soumettre. Dans l'intérêt de tous, et surtout du mien, pourrais-tu faire en sorte qu'Edward garde ses distances ce soir ? Je préférerais survivre à cette nuit et je crains de ne pouvoir le faire s'il s'obstine à vouloir me trouver... » Elle supposa que tout le monde avait entendu parler de l'histoire de la mise en examen bien trop vite avortée, et espéra que Grace, rare personne qu'elle estimait dans cet endroit, la prenne au moins un peu en compassion, assez pour décourager l'autre fou furieux d'Edward. Ses prunelles avisèrent très vite Callie, jumelle à laquelle elle n'adressait pas un mot depuis leur dernière dispute, ainsi que Nate, un peu plus loin. Si la nuit allait être longue ? Interminable, aurait été plus juste.

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Quelques gouttelettes de pluie se déversant sur le macadam et c’est une population entière qui se réfugie dans les sous-sols de la caverne d’Ali-Baba. Mouvement de foule outrancier qui, bien-entendu, ne m’évoquait rien d’autre qu’une profonde exaspération avant même que je n’ai pu atteindre les lieux. Ce qu’ils pouvaient être mièvres ces moutons écervelés à courir dans tous les sens pour s’abriter d’une petite douche. Dans le pire des cas, certains se prendraient éventuellement un ou deux troncs d’arbre à la figure (Blaze si tu m’entends, sache que je prie pour ta mort). M’avançant d’un pas assuré le long de la foule agglutinée, je ne masquais pas une seule seconde mon impatience. Un juron, deux jurons, et bref, inutile de les compter puisqu’ils ponctuaient chacun de ses soupires. Grincheux était de sortie. Et là.. Cerise sur le gâteau. « Bon, elle va être gentille et bouger son gros falzar la mémère. » pestais-je à l’adresse d’une bonne femme qui avait apparemment décidé de me bloquer le passage. Et en plus d’être énorme, madame semblait avoir perdu l’usage de l’ouïe. Perfection. Quelle journée enchanteresse. Pourvu au moins que les listes puissent atténuer un tantinet ce calvaire qu’allait être les prochaines heures ici. Déposant un œil avisé sur les quelques silhouettes connues que je parvenais à croiser, mon attention fût finalement retenue par le fameux script déterminant nos fonctions. Un ravissant sourire déchira lentement les commissures de mes lèvres tandis que je ricanais tout seul devant ma feuille. Edward Livingston se prêtant au rôle de supervision des autres groupes. En d’autres termes, ces pauvres petites têtes blondes risquaient de passer un très mauvais quart d’heure au fond de ce labyrinthe sous-terrain. Gouffre de l’enfer qui, je le jure devant Dieu, anéantirait certains de mes ennemis. Finalement, cette petite tempête était un parfait prétexte pour commettre un meurtre en toute discrétion. C’était sans compter le reste des inscriptions qui indiquaient quels seraient mes camarades de jeu. Une Maire tyrannique à la poitrine sur-développée ; une adepte du Pape prétendant à la Sainte chasteté ; deux kékés des plages et playboys tombeurs ; et… oh miséricorde, que vois-je, une domestique sadomasochiste au caractère bien trempé. Merci bien Seigneur. Prétendre vouloir aider le peuple pour mieux noyer mes victimes sous le poids de mon amertume, ça n’a pas de prix. Me dirigeant calmement jusqu’à notre petit point de rassemblement, je dévisageais d’un regard amusé les quelques visages qui osaient détailler ma venue. Pourquoi Diable ces petits vaux-rien soupiraient-ils de désarroi devant leur groupe ? En ce qui me concerne, je n’aurais pu espérer mieux tomber. Néanmoins, si ma jovialité atteignait en ce moment-même son apogée, très vite mes prunelles vrillèrent la silhouette de Môsieur Wren Kennedy. Le sourire sur mon visage fondit comme neige au soleil tandis que je marquais mon entrée d’un air théâtral. Ouhlà. Sa Seigneurie est priée de vite retirer ses paluches de celles de mon Elise. Quel dommage que mon poignard fétiche soit resté dans mon veston du dimanche. « Kennedy, le tombeur de ces dames en toutes circonstances. » constatais-je d’un air solennel avant d’adresser un charmant rictus au concerné. Va donc sauter ta Reine au lieu d’empiéter sur la mienne, idiot. Grognant dans ma barbe, je gratifiais au passage la demoiselle d’un clin d’œil amer avant de tourner les talons. Qu’à cela ne tienne Steadworth, nous règlerons nos comptes plus tard. Voyons.. sur qui puis-je déverser ma rage autre que ce bouffon de prince pas charmant pour un sous. Mais la meilleure d’entres-toutes bien sûr ! Puisque la voilà qui se dessinait finalement sous mes yeux. Mon jouet fétiche, ma petite victime adorée, le fantasme de mes rêves sadomaso. En compagnie de la Maire, la donzelle paraissait lui intimer quelques mots d’un air vraisemblablement peu rassuré. N’ai point d’inquiétude Trésor, ton preux chevalier vient tout juste d’arriver. « Tiens, Bonnie ! Je suis terriblement déçu de constater que tu n’es pas morte écrasée par un tronc d’arbre… Mais la déception fait partie intégrante de ma vie on dirait, il va falloir que je m’y habitue. » Les lèvres étirées en un sourire fier et narquois, j’accostais mes deux femmes tout en les saluant d’une ironique courbette. Le regard braqué en direction de celui de la Cartwright, j’étouffais un ricanement en venant déposer une main câline le long de sa joue. Geste en apparence adorable mais qui trahissait le menu que je comptais lui servir tout au long du déluge. Au programme ma jolie : séance de torture, esclavagisme, ridiculisation et –éventuellement- relation sexuelle non consentie. Illustrant mes pensées en faisant glisser ma main le long de ses hanches, je la promenais innocemment jusque dans le creux de sa paume. Quel adorable couple formerions-nous ! Sociopathe ? Si peu. Je ne suis après-tout qu’un homme rancunier… qui ne le serait pas après avoir passé une nuit derrière les barreaux ? Apercevant soudainement du coin de l’œil le gentil et joli Wren proposer sa veste à ma Muse personnelle, je ne pu m’empêcher de pincer les lèvres tout en laissant mes doigts venir promptement serrer la main de Bonnie. Si elle avait mal ? Je m’en foutais. Toutefois, préférant regagner le peu de contenance qu’il me restait, je reculais d’un pas en relâchant ma martyre. Regard de braise résolument fixé sur la Maire désormais, j’arquais un sourcil. « Bouh c’est vrai qu’il fait relativement frisquet ici. Baker, qu’attends-tu pour me proposer ta veste très chère ? » Intonations railleuses et expressément prononcées d’une voix portante, je mimais l’allure d’un homme frigorifié tentant de se réchauffer les mains. Misérables vermines. A l’entente du grognement caractéristique de Jaden, un rire nerveux s’échappa de ma bouche. En quel honneur la ramenait-il celui-là aussi ? Fiston, tu devrais pourtant savoir que personne en dehors de moi n’est amené à exprimer son mécontentement ici. « Oh et puis l’autre Kidy Kidd, il va gentiment arrêter de râler comme un bœuf et se rendre utile pour une fois. » marmonnais-je d’un air dédaigneux tout en haussant les épaules. Le moins que l’on puisse dire, c’est que mes partenaires risquaient d’être (très) divertissants. Et à en croire la moue glacée que miss blondinette à forte poitrine me lançait en ce moment-même, le reste des festivités ne tarderait pas à voler en éclats d’ici peu. « Hé bien, quel groupe mes aïeux. On va s’amuser comme des p’tits fous ! » Regard pétillant de malice, je m’en frottais machinalement les mains. Misérables crétins incapables de discerner la véritable apocalypse. La tempête pouvait bien continuer de martyriser nos terres, c’est de ma rage dont les habitants feraient mieux de se préoccuper. Certains pourraient d’ailleurs en témoigner au vu de nos histoires communes : un Livingston contrarié ne présage jamais rien de bon. N’est-ce pas Bonnie ?

Invité

Les cheveux trempés et grelottant jusqu'au bout des orteils, c'est en tout subtilité que Callie fit son entrée au Cave of Wonders, son inséparable boule de poil au bout d'une laisse. Venus la chercher à son domicile, les policiers avaient longuement tenté de la convaincre de laisser son chien à la maison, qu'il ne courrait pas le moindre danger mais elle s'était voulu aussi têtue qu'une mule et bien décidée à rester chez-elle s'il ne l'accompagnait pas, si bien qu'ils n'avaient eu d'autre choix que de se ranger de son côté et d'accepter, à contre-coeur, qu'il lui tienne compagnie dans la petite boutique. Attachée à cet animal plus qu'a bon nombre d'être humain, elle ne pouvait se résigner à l'idée de le laisser seul à une pareil température, encore moins en sachant qu'ils courraient tous un danger s'ils ne se rendaient pas d'urgence dans ce vieux sous-sol. Peu envieuse à l'idée de se retrouver entourée de tout Fairview au grand complet, la jeune femme tenta de se faire le plus discrète possible, quitte à se cacher derrière les poutres et les gens pour éviter de se mêler à la foule. Elle n'avait pas envie de se fondre à un groupe et encore moins de jouer les superviseurs avec les trois tyrans qu'étaient Bonnie, Edward et la maire de la ville, le tout sans compter la présence de Nate avec qui elle devait prétendre jouer les connaissances alors qu'ils partageaient tellement plus. Son regard vint percuter celui de sa jumelle et presque aussitôt, elle détourna les yeux, prétendant même être dans une grande conversation avec une vieille mégère à ses côtés. Depuis leur énième dispute au restaurant, elles ne s'étaient plus adressé la parole et faisaient tout en leur possible pour s'éviter au maximum, trop orgueilleuses pour faire le premier pas l'une vers l'autre. Pour Bonnie, la seule responsable était Callie alors dans son cas, la seule à blâmer était Drama Bonnie, ni plus ni moins. Peu à peu, les groupes se formèrent aux alentours et malgré sa réticence à rejoindre le sien, la jeune femme dû se faire à l'idée qu'une horrible soirée l'attendait, formé d'horribles personnes. Bien qu'elle ne connaissait pas Edward personnellement, elle savait pertinemment à quoi s'attendre et avait bien conscience que ça n'allait pas être de tout repos, au vu du sourire narquois qui prit naissance sur ses lèvres. Lèvres pincés, elle lui lança un froid regard avant de croiser ses bras ensemble, Bad Wolf reposant à ses pieds. L'envie de lui ordonner d'attaquer l'horrible être qui jubilait devant eux lui prit soudainement et elle dû se mordre violemment la lèvre pour ne pas agir. Cet air arrogant, cette facilité qu'il avait à glacer le sang d'autrui avec de simples paroles, elle ne pouvait le supporter, encore moins lorsqu'elle le voyait être aussi condescendant à l'égard de sa jumelle. Callie n'avait que faire de ce lien qui pouvait les unir ou encore de cette prise de bec qui avait prit racine entre elles depuis quelques jours, Bonnie restait sa soeur et quiconque voulant s'attaquer de près ou de loin a elle se voyait offert une place de rêve sur sa liste noir. « Il ne t'arrive jamais de la boucler ? » Souffla-t-elle d'une voix presque inaudible qui, de sa bouche, paru presque polie. Au diable les salutations et présentations conventionnelles. Pour son envie de passer inaperçue, c'était raté.

Grace balayait une large partie des sous-terrains de son regard glacial, incitant les quelques citoyens apeurés ou simplement indolents à se mettre au travail au plus vite en les dardant de ses yeux perçants aux reflets métalliques. Soucieuse de son image publique le reste du temps, la maire estimait ce soir jouir d'une certaine liberté bien venue : la situation lui octroyait une autorité de laquelle elle comptait bien user. Après tout, les situations de crise imposaient un certain leadership et c'était d'ailleurs de ces contextes particuliers que naissaient les régimes totalitaires. Un homme s'élevait, prétextait oeuvrer pour le bien commun, gagnait le respect d'une foule dissolue et finissait par s'emparer du pouvoir. Bien entendu, il réglait la situation préjudiciable à l'origine de sa portée aux nues pour asseoir sa réputation mais terminait invariablement par s'octroyer une toute-puissance et opprimer ceux qu'il défendait âprement jusqu'alors. Évidemment, Grace ne désirait pas ce genre de destin. La reine qui sommeillait profondément en elle ne se faisait pas assez entendre pour lui donner envie de soumettre Fairview à son bon vouloir. Elle désirait simplement que ces quelques nuits se passent au mieux et pour cela, il lui fallait être écoutée, tout bonnement. En tant que maire, elle ne faisait que son devoir et même une Bonnie survoltée ne pourrait lui mener la vie dure. « Bonsoir Bonnie. Un siège, vraiment ? A mon sens ce n'est qu'une précaution nécessaire mais tu comprendras mon point de vue lorsque la tempête se sera chargée de causer d'innombrables dégâts au sein de ton joli restaurant. J'espère que tu t'es montrée prévoyante, ils annoncent de violentes bourrasques et l'on sait toutes deux à quel point les assurances peuvent se montrer récalcitrantes... » Voix de velours, ton doucereux et sourire mielleux, Grace se montrait en excellente forme avec une Bonnie qui ne lui déplaisait pourtant pas particulièrement. Simplement, la soirée serait bien assez longue sans ton supérieur, ses minauderies et son caractère explosif. La maire préférait que la plus piquante des jumelles se fasse un sang d'encre pour son restaurant et l'imagine avec une vitrine délabrée (ce qui risquait de toute façon d'arriver) afin qu'elle conserve le plus longtemps possible un silence enchanteur. Bien évidemment, ce fut peine perdue et Grace l'écouta à peine geindre concernant Edward. Elle peinait vraiment à comprendre quel était le problème de toute la ville face à lui. Était-il si intimidant ? Non, bien sûr que non. Du moins, la belle blonde ne le distinguait absolument pas de cette façon et ne le craignait pas outre-mesure, sachant que quoi qu'il tente pour lui nuire, elle serait en mesure de le contrer aisément. Bien entendu, elle n'était pas en mesure de réaliser qu'Edward connaissait des aspects qui lui échappaient et qu'en l'épargnant, il s'assurait un futur moins houleux que celui de Iago aux côtés de sa Reine. Haussant un sourcil exprimant à lui-seul le dédain que lui exprimait la tirade fantaisiste de Bonnie, Grace retint vaguement un soupir agacé avant de répliquer aussi sec : « Bien que l'idée ne lui déplairait pas, je ne tiens pas encore Edward en laisse. Et s'il te plaît Bonnie, juste pour quelques heures, cesse de transformer ton existence en mélodrame. Rien de fâcheux ne t'arrivera ce soir. » Terriblement condescendante tout en demeurant d'une cordialité exemplaire (bien que froide), Grace décida de prendre congés de son 'amie' (oui, leur relation ne rentrait dans aucun standard, et alors ?), s'éloignant de quelques pas après avoir gentiment tapoté sur son épaule, telle une mère s'exprimant auprès de sa fille récalcitrante. Et comme dans un cauchemar, Edward fit sa tonitruante apparition, bien incapable de faire preuve d'une once de civisme, pour une fois. Contrairement à de nombreuses personnes, Grace n'était nullement au courant de ce fâcheux épisode entre Bonnie et Edward. Si elle l'avait su, elle aurait saisi cette chance non pas pour se débarrasser du journaliste, mais pour épingler Rose pour faute professionnelle afin de la remplacer par un sheriff plus... malléable. Ou dévoué à sa cause, qui sait. Fusillant Edward du regard, Grace le laissa déverser ses répliques acerbes, son visage aquilin marqué par un ennui profond. Assez peu disposée à lui laisser transformer la soirée en l'un des spectacles pathétiques dont il était héros, la maire le rejoignit en deux enjambées, ses escarpins martelant violemment le sol, afin de se planter entre lui et Bonnie. « Edward, laisse-moi être très claire avec toi. Quelqu'un a apparemment commis la grossière erreur de te placer dans ce groupe mais jusqu'à nouvel ordre, je suis la responsable ici. Alors si tu n'as pas envie de passer la soirée à distribuer des boîtes de conserve ou bien à coller des pansements sur chaque genou écorché du coin, je te conseille de te comporter en citoyen responsable, pour une fois. » Ses prunelles argentées intensément vrillées sur la silhouette du journaliste, Grace s'amusait plus qu'elle ne l'aurait dû de ce cordial échange en public. « Me suis-je bien fait comprendre ? » ajouta-t-elle pour enfoncer le clou de sa délicate réprimande, un sourire défiant flottant à ses lèvres vermeilles, tandis que son index venait se darder contre le torse d'Edward, l'intimant à ne pas dépasser les bornes. Pas ce soir, pas ici. Grace n'était pas d'humeur à plaisanter. Il lui fallait conserver la situation sous contrôle sans quoi l'orage extérieur serait un danger moins oppressant que les états d'âme de ce sous-sol. Et pour une femme aussi insensible et détachée qu'elle, gérer les débordements d'émotions des uns et des autres paraissait insurmontable. « Le cas contraire, je ferais semblant de ne rien voir lorsque ton ami Kiddy Kidd te refera le portrait. » qu'elle souffla voluptueusement à son adresse, la voix trop basse pour être perçue des autres convives. Après tout, nul ici n'ignorait le caractère impétueux de Jaden et l'aisance avec laquelle il laissait ses poings parler à sa place. Si Edward ne l'écoutait pas, sans doute finirait-il par se soumettre au bon vouloir du restaurateur. L'idée la divertit un instant, tandis que Grace imaginait son acolyte geindre sous les coups. Le journaliste était de ceux qui maniaient les mots, ce qui le rendait à ses yeux parfaitement hermétique à l'usage de ses poings. S'écartant enfin de lui, la maire décida tout bonnement de le snober jusqu'à son prochain écart. Retrouvant un visage serein quoique impassible, Grace se retourna vers le reste de la salle, un sourire (faible et forcé, bien sûr) aux lèvres. « Bon, où en étions-nous ? » Alors qu'elle allait proposer un plan très simple (qui consistait à jeter un oeil aux groupes de temps à autres après avoir désigné un représentant pour chacun d'eux), Callie décida d'attaquer Edward. Voulait-elle à son tour subir une humiliation publique ? Grace se contenta de lui lancer un regard noir tout en la giflant mentalement. S'épuiser sur l'autiste des Cartwright ne lui inspirait rien d'autre qu'une profonde indifférence...

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